Sensibilité à fleur de peau et voix d’ange : Chris Garneau le new-yorkais nous livre la musique d’un songe, d’une méditation. Son œuvre est mélancolique et spirituelle. Une fois de plus, on ne voit pas comment cet album pourrait échapper aux louanges. Tout cela ressemble beaucoup à du Sufjan Stevens : même timbre, mêmes audaces dans les arrangements : harmonium, orgue, piano, glockenspiel, violons, harmonica,… Il y a comme un désir de se gorger de vie et de sons. Toutefois l’ensemble est souvent plus triste et l’audace plus retenue que chez Sufjan. On pense aussi à Cocoon, qui représente un peu le versant folk du genre.
L’album est divisé en quatre parties : printemps, été, automne, hiver. L’ouverture fait froid dans le dos : un comble pour la saison où tout renaît. L’harmonium nous rappelle les textures glacées de l’univers de Nico, les violons forment une plainte, comme si la vie qui surgit détruisait quelque chose. Le reste se divise entre morceaux guillerets et ballades mélancoliques. Pour un « Dirty Night Clowns » condensé et efficace, pour un « Fireflies », sorte de vignette rigolote à la « After Hours » (le seul genre où Moe Tucker avait le droit de chanter), on trouve plusieurs chansons épurées, au piano, avec ici ou là des percussions à peine effleurées, un orgue lancinant ou une guitare discrète : « Raw And Awake », « The Cats And The Kids » en sont de parfaites illustrations. Au passage, Chris Garneau nous fait Cat Power avec son « I don’t blame you » perso : « Hands On The Radio ». Les deux derniers morceaux « Things She Said » et « Pirates Reprise » nous font définitivement décoller dans une sorte de sublimation onirique. Un peu comme lorsqu’on écoutait « Berlin » et qu’à la fin la lumière semblait pouvoir disperser les ténèbres, sauf que chez Garneau la lumière affleure sans l’horreur. |