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Bertrand Betsch
 

par Pierre Derensy (24/08/04)

 
Extrait en musique

 

 
Article par I-Muzzik

 

Bertrand Betsch de par ses textes, cravache sadiquement dans la gueule, tout en souriant, la chanson française. Mais plus vicieux encore, il compose des mélodies beaucoup plus délicates que ne l’auraient souhaité ses paroles crues. Histoire de faire le beau, de draguer la teen-ager en boite de nuit avec un tube « Pas de Bras, Pas de Chocolat » qui donne son titre à l’album. Figure montante de la nouvelle vague rock-pop, il n’a pas fini de montrer les dents. Rencontre avec l’abominable B.B qui venait de subir un orage chez lui !

Comment allez vous après ces intempéries domestiques ?

B.Betsch : « L’eau représente l’émotivité et comme je suis un grand émotif je me fais submerger. Maintenant ça va mieux, j’attends le prochain orage avec impatience. Ca été des centaines de litres d’eau dans ma maison donc des heures d’écoppage.»

Apparemment vous n’aimez pas les artistes qui ont les mêmes initiales que vous ?

B.Betsch : « Oui je ne comprends pas que des gens puissent avoir les mêmes initiales que moi.

Est ce à dire que vous avez peur de finir nu à la madrague en compagnie d’un âne émasculé à tendance d’extrême droite ?

B.Betsch : « Peut être un peu. »

Dans cet album, on a l’impression que vous avez voulu toucher musicalement à tous les genres d’un coup ?

B.Betsch : « L’album est le fruit de ce que j’ai pu écouter ces 5 ou 6 dernières années. J’ai tendance à être curieux de tout. Je prends aussi bien un peu de jazz, que d’éléctro, beaucoup de reggae, un peu de rock, pop, chanson, musiques du monde. Je trouve mon compte dans tous les genres en sachant qu’il y a un tri à faire. Généralement 99% des choses sont à jeter mais même dans le hard-rock il y a des choses bien. Par exemple AC-DC première formule. »

Toutes ces influences viennent donc tourner à un moment ou à un autre sur le disque ?

B.Betsch : « Cela déteint effectivement sur ma musique. Tout du moins sur ce disque là. Quand je fais des emprunts, quand je prends une rythmique reggae je fais clairement référence au genre musical. Quand je sample un bruit de musique du monde c’est identique. Je qualifierais plus ça d’emprunt que d’influence. »

‘Des gens attendent’ est le symbole de ce fourre tout organisé ?

B.Betsch : « J’ai fourré pas mal de truc la dedans effectivement (rire). »

Comment fait on pour marier des sons « antisoniques » ?

B.Betsch : « C’est une sorte d’alchimie se faisant à notre insu. Les choses s’imbriquent comme ça, d’elles mêmes pour former quelque chose de cohérent. Quand j’ai besoin d’un son j’en prends un au hasard dans ma sonothèque et souvent cela sonne juste. Je sais pas pourquoi. C’est même la bonne tonalité. Y a des sortes d’instants de grâce dans le processus de compostions et d’arrangements. »

Tout ce travail, vous le faites en amont du studio ?

B.Betsch : « Je déteste travailler en studio. J’arrive toujours avec mes bandes personnelles pour y rajouter des trucs, pour refaire certaines prises. Parfois je garde les trois quart que je fais à la maison dans mon petit studio. Le lieu d’enregistrement de l’album est plus pour moi un moyen de finaliser, de donner de l’ampleur à la production. »

Tu as réussi à te démarquer de l’image de ‘l’artiste intimiste’ qui aurait pu très rapidement te coller à la peau ?

B.Betsch : « Il y a eu une interférence avec mon directeur artistique. Il a voulu montrer d’autres facettes de ma personnalité, de mon travail. Il voulait ménager des portes d’entrée dans l’album avec des chansons faciles comme ‘Temps Beau’ ou ‘Les Passes Temps’ afin d’introduire le grand public à des chansons plus costaudes. Disons des titres avec une ambition supérieure comme ‘Les Petits Mammifères’, ‘L’Ancienne Peau’ ou ‘Tout Vu’. Dans ce nouveau disque on a voulu adopter la technique du cheval de Troie : c’est à dire de Diffuser un morceau facile pour amener les gens à écouter autre chose que toute la grosse merde qu’on entend à la radio. »

Quelles peuvent être vos artistes loués dans votre processus de création personnelle ?

B.Betsch : « D’une manière générale j’ai beaucoup de mal à dire ce qui pourrait m’influencer réellement. Ma formation musicale s’est faite très tôt. Pas à l’époque intra-utérine mais dès mon enfance. J’ai été baigné par des mélodies. Ensuite arrive l’adolescence où l’on fait des rencontres avec certains artistes. Moi, à l’âge de 12 ans mon frère écoutait Manset et j’ai su aussitôt que je voulais faire auteur-compositeur-interprete. Dès cette époque j’ai voulu organiser cette réunion entre des mélodies et une voix particulière pour porter des textes forts. »

Généralement êtes-vous le type d’artiste à vous triturer les méninges sur 300 versions différentes avant de choisir l’officielle ?

B.Betsch : « Je travaille, normalement, d’une façon spontanée avec l’envie que la première version soit la bonne mais sur cet album tout a disfonctionné et a été à l’encontre de mes méthodes habituelles. L’album s’étant fait sur une longue épopée de 6-7 ans, il y avait au final plusieurs versions de chaque titre en poussant toujours plus loin le processus de création. On a donc pris du temps. C’est un album exigeant et longuement mûri en recherche. »

Vous parvenez à installer des climats variés au final ?

B.Betsch : « Mon ambition était que l’album soit respirable. Dans mes premiers projets de l’album je me suis pointé avec des morceaux plombés, qui sonnaient très fort mais qui s’annulaient les uns les autres, à cause du climat étouffant sur la longueur. J’ai appris à construire un album. Agencer un album en choisissant la bonne version c’est aménager des points de rupture, de respiration. Peut être qu’un jour, si je continue à faire des disques, je ferai quelque chose de plus ramassé. De plus court et moins hétéroclite. J’aimerai aussi passer par l’expérience de l’album thématique. »

Pourquoi avoir voulu donner deux versions à « Pas de Bras, Pas de Chocolat » ?

B.Betsch : « C’est anecdotique. On aimait bien les deux versions et dans l’incapacité de trancher on a jugé agréable de laisser les deux. »

Comme vous le chantez « Les mots ont leur importance » ?

B.Betsch : « Je suis une sorte de graphomane. J’essaye d’amener, en creusant la phrase, à un équilibre d’une chanson accessible à tous tout en ayant une valeur poétique. »

Etes vous le Breat Easton Elis de la mélodie française ?

B.Betsch : « Je déteste cet auteur. Pour faire une paraphrase c’est vraiment en dessous de zéro. B.E.E c’est très froid alors que moi j’essaye de faire passer certaines émotions quand même. »

Vous écrivez aussi des nouvelles, de quelle manière changez vous votre façon d’appréhender l’écriture d’avec une chanson ?

B.Betsch : « Ca n’a rien à voir. Ecrire un texte littéraire c’est un travail très ardu, de longue haleine, alors que les chansons cela me tombe dessus comme-ça, comme si j’étais une sorte de médium, de récepteur destiné à devenir un émetteur. Je ne me suis jamais assis à ma table de travail en me disant « je vais écrire une chanson ». Je crois beaucoup à l’inspiration, c’est vraiment les chansons qui me tombent dessus et qui viennent me visiter. Je n’ai plus qu’à me mettre dans un état de disponibilité pour recevoir les morceaux et les transcrire. C’est un travail d’écoute beaucoup plus que de recherche. Généralement cela se fait assez vite. »

Pour vous « Ecrivain » sur le passeport aurait plus de gueule que « Musicien » ?

B.Betsch : « Non, j’espère qu’un jour je pourrais publier mes bouquins en même temps que mes disques. Je ne pense pas que nous pouvons mettre en parallèle la chanson et la littérature. Il y a d’autres arts qui se marient plus comme le cinéma et la musique.»

L’écriture fut elle un produit de substitution au moment où vous avez eu cet accident de voix ?

B.Betsch : « Disons plutôt que la substitution s’est faite à travers la création de musiques instrumentales. J’ai découvert cette facette que je n’avais pas jusque là beaucoup développé. Sinon, comme je ne pouvais pas chanter en voix claire, je mettais des distorsions sur ces titres, ce qui me permettait de masquer mes défaillances tout en mettant du volume. J’ai vécu une période où j’allais mal, mettant partout du volume trash, avec des sons saturés de guitares et claviers.

Quand on visite ton site Internet, on s’aperçoit que tu n’hésites pas à dire ce que tu aimes et ce que tu n’aimes pas également ?

B.Betsch : « Je suis dithyrambique sur ce que j’aime par contre je prends trois, quatre lignes pour dire ce que je n’aime pas. En prenant de l’âge je m’aperçois que ce n’est pas une question de ressentiments mais de disparitions. Je fais en sorte que ces choses n’existent pas. Je pense à certains artistes, à certains disques qui me paraissent inconsistants. Je ne suis pas en colère contre ça, en fait je crois que dans 10 ans quand on écoutera ces « artistes » il n’y aura plus rien sur la bande. Les chansons se seront effacées d’elles mêmes. Ces gens auront contribués à fabriquer du silence, ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose. »


Pierre DERENSY.