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Rodolphe Burger (Paris 2009)
 

par Adrien Lozachmeur (05/03/09)

 
Extrait en musique

 

 
Article par I-Muzzik

 

Le Bataclan était presque plein pour la représentation de Rodolphe Burger. Le public était relativement âgé, à croire que les moins de 30 ans sont condamnés à rester à l’écart des moments de bonheur que peut offrir cet artiste discret, stakhanoviste en son genre. C’est qu’il bosse notre ami : depuis Kat Onoma, il ne s’est pas arrêté, gérant à la fois une carrière solo et de multiples collaborations plus ou moins médiatisées, de l’album avec Jeanne Balibar aux piges pour Bashung en passant par les expériences plus conceptuelles. On ne le répètera jamais assez : Kat Onoma était le meilleur groupe de rock de l’Hexagone. Certains ont cru que les années 90 appartenaient à Noir Désir, soit. Mais les Kat Onoma étaient plus fins, plus racés, sans doute trop fins, trop racés. Et Rodolphe Burger était l’âme du groupe et c’est donc naturel qu’en solo il dégage cette même classe incommensurable. Les seuls défauts de Rodolphe, c’est d’avoir un chant un peu trop parlé et un accent trop français pour les titres en Anglais. A part ça, il a un timbre de voix incroyable, un timbre à la Gainsbourg, mais comme si Gainsbourg avait laissé tombé ses complexes et se sentait sûr de son pouvoir de séduction. C’est ça la voix de Rodolphe : Gainsbourg mué en Casanova, un pouvoir auquel rien ne résiste. Rien que ça suffirait mais en plus Rodolphe Burger est un des meilleurs guitaristes de la planète. On entend ce son et on se dit : tiens, c’est Rodolphe Burger. Un truc à vous coller des frissons, c’est blues, nerveux et parfois très romantique. Samuel Hall sur la fameux « Fantaisie Militaire » de Bashung, c’était lui évidemment. Alors au Bataclan on s’est régalé. On a eu le droit à quelques classiques de Kat Onoma, notamment « La Chambre » et ses mots soyeux pleins d’arrière-pensées, chef d’œuvre absolu de déclaration ambiguë ou « Billy The Kid » et sa confidence en boucle - Billy The Kid, I love you. Et puis il y eut aussi les reprises incroyables dont est coutumier Rodolphe. Ce mec est le champion de la déconstruction. Comme un Deleuze rock. Il déstructure un classique et le reconstruit à sa manière, aplatissant les modulations du chant pour accentuer plutôt sa puissance intrinsèque (puisqu’il parle plus qu’il ne chante), et gonflant les guitares sur des morceaux guère habitués à de telles enluminures. Premier titre revisité : Love will tear us apart, dans une version qui n’a pas à rougir de l’original. Puis vint « The Passenger » avec le passablement éméché David Thomas en guest (un David Thomas pas tout à fait convaincant en première partie : travail sur l’atmosphère et voix incroyable, mais ça ne passait pas. On aurait préféré revoir le bonhomme jouer du Pere Ubu mais bon, un artiste se doit d’évoluer). Le clou du spectacle ? Une interprétation de Radioactivity dans une lumière bleutée, libérant les flux d’énergie évoqués beaucoup plus froidement par les Kraftwerk en leur temps. La version allemande était une promesse d’irradiation, la version énergique de Rodolphe nous en indique les effets. A côté de ça, les titres du dernier album sont certes intéressants par leur propos engagé : charge anti-sarkozy, ode à la diversité culturelle avec un discours sur l’immigration sous-jacent. Mais musicalement, ça n’est pas tout à fait la même chose. Souhaitons donc longue vie à Rodolphe Burger, celui sans qui on n’oserait jamais affirmer tout haut que le rock français n’est pas une blague.