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Babx
 

par Pierre Derensy (02/04/06)

 
Extrait en musique

 

 
Article par I-Muzzik

 

Chez Babx, il y a cette histoire de devanture alléchante avec un single radiophonique « Sillicone Baby », mais c’est bien dans l’échoppe et même dans l’arrière boutique, c’est à dire dans le reste de l’album, qu’il faut trouver les petites merveilles enfouies sous un néon putassier. Ce garçon n’a pas fini de nous étonner, espérons qu’il reste petit marché et ne succombe pas à la grande distribution. En même temps, après cette rencontre : il y a vraiment peu de risque.

Le botox est-il la pire chose que l’on puisse offrir à son corps ?
Babx : «C’est un des outils qui peut permettre le sacrifice (rire). «Silicone Baby» parle du sacrifice moderne du corps pour la beauté, pour l’apparence, pour tout ce qui sert la cause moderne de l’image. C’est la suite logique sur ma chanson sur le loft. C’est le yang de «Kamikase».»

Quand on devient artiste, qu’on sort son premier opus, on est parfois obligé de se refaire une partie du cœur pour rentrer dans les cases et les bacs, l’avez vous fait sur ce premier album ?
Babx : «Surtout pas ! je n’ai rien à me refaire faire pour le moment (rire). Je n’ai fait aucun compromis dans mon boulot qui est d’écrire des chansons. «Silicone Baby» je l’ai écrite car lorsque j’étais en pourparler avec les maisons de disques, ils me disaient qu’il n’y avait aucun single sur mon disque, qu’il n’y avait pas de titre qui pouvait passer à la radio. Donc un peu par réaction et énervement je l’ai enregistré pour parler du formatage.»

Justement, ce titre qui passe en radio, qui commence à se faire entendre n’est-il pas le moins représentatif de votre univers ?
Babx : «Ha si complètement (rire). De vous à moi c’est le moins représentatif mais ça résume d’une manière sarcastique ce qu’on peut attendre d’un artiste avec son disque. Pour moi la notion de single c’est assez abstrait. A mon sens, on rentre dans une chanson ou l’on n’y entre pas. Il n’y a pas de recette miracle ! J’ai fait exprès d’aborder la chanson jetable ! (rire)»

Votre album est très marqué par des sujets actuels, tout en étant un compromis entre 2 « anciens » : Tom Waits et Jacques Brel ?
Babx : «Ecoutez là vous ne pouvez pas me faire plus plaisir. Je ne parle pas de l’actualité pour essayer de me donner une bonne conscience engagée mais pour moi l’actu est bourrée de symboles très forts. Le Loft et son œil, cet espèce de regard sur des gens enfermés dans une pièce. Pour moi, un kamikaze c’est bourré de symbole.»

Nous sommes quand même dans une société qui adore le politiquement correcte. Dans « Kamikaze » ou dans « Secret Professionnel » vous ne prenez pas de gant avec la bêtise que peut engendrer une religion, avez vous pensé à ne pas mettre ces chansons ?
Babx : «Pas du tout ! souvent la correction politiquement correcte cache quelque chose sous le tapis. Plus la société se retrouve dans ce politiquement correcte plus la balance pèse vers la violence. Cela me paraissait important de les écrire, de les enregistrer et de les chanter.»

Avez vous lu « Souvenir d’un Pas Grand Chose » de Bukowski, il y a la même tendresse croisée avec la douleur de la chair ?
Babx : «Non mais j’aime énormément toute cette littérature américaine. Tout ce langage m’a bouleversé et servi dans ce que je fais aujourd’hui. Ce mélange de tendresse et de monstruosité va bien avec le regard que je peux avoir sur les choses. »

La Barbie écartelée dans le livret ne doit donc pas être là par hasard ?
Babx : «La personne qui a fait le livret s’appelle Laurent Allaire, c’est un plasticien que j’aime infiniment. On s’aide beaucoup dans nos univers respectifs. Il a mis ses images et son regard de façon très juste par rapport à mes chansons.»

Entre votre maxi de 7 titres et cet album il s’est passé quoi ?
Babx : «On a enregistré pas mal de titres en attente de l’être. Il s’est passé la signature, la rencontre avec le tourneur, pas mal de concert dont les Francofolies. Pour le maxi on avait déjà 15 titres de prêts et je réservais cela pour le second album, quelqu’un m’a dit fort justement que j’étais con de ne pas faire un milk-shake des deux. J’ai donc sorti ce qui me plaisait le plus.»

L’allitération en « X » de « Crack Maniac » c’était un challenge personnel ?
Babx : «Ce n’était pas un challenge, c’était pour donner des sonorités de rues, de klaxons. Des allitérations violentes et percutantes. J’habite à Château Rouge et cette chanson c’est le bruit que fait un mec qui se détériore de jours en jours, qui marche avec des béquilles douloureusement car il se détériore à cause de la drogue. Ce claquement qu’il produit, j’ai voulu faire pareil avec la langue.»

C’est presque une chanson qu’on pourrait dire rappeuse dans tous les sens du terme ?
Babx : «J’aime énormément le hip-hop. Quand c’est bien fait. Des gens comme Bubba qui ont une écriture hallucinante, cela va chercher dans le texte bien plus loin que des gens de la chanson ou les poètes. Ce sont des mots d’aujourd’hui qui touchent au plus juste.»

Vous rendez aussi un bel hommage à votre mère, vous devez beaucoup à son piano ?
Babx : «Oui et à elle aussi (rire). C’est vraiment très autobiographique. Mes 5 premières années de ma vie je les ai passées sous ce piano car ma mère n’avait pas les moyens de me faire garder. Elle était professeur de piano et me calais sous l’instrument. C’était mon aire de jeu, mon lit. Une sorte de cabane.»

Vous avez appris le jazz vocal est ce que c’est cela qui vous donne ce phrasé si particulier ?
Babx : «Certainement que cela a du y contribuer. Ce phrasé que j’ai c’est un mélange de plein d’influences. Du hip-hop aux chanteurs français jusqu’aux artistes de Word musique comme Nusrat Fateh Ali Khan. Des gens moins connus aussi comme André Minvielle qui a trouvé quelque chose dans les langues. La musique en elle même m’a beaucoup apporté dans les mots. Le langage peut être très rythmique. Avant même que l’on comprenne quoi que ce soit il faut que cela sonne à l’oreille !»

N’ayant pas qu’une corde à votre arc vous faites aussi le métier de comédien ?
Babx : «Je ne suis pas comédien ! ce serait irrespectueux pour ceux qui le sont ! (rire) Quand j’étais gamin je voulais faire « Les Enfants du Paradis ». J’avais un rapport très poétique à la scène. Après quand j’ai approché ça de plus près ça m’a gonflé car les comédiens pour certains sont des gens qui se regardent beaucoup, qui s’écoutent beaucoup. Quelque chose qui se retrouve dans la chanson mais je ne fréquente pas les chanteurs (rire). Et puis les castings, ce type de concours permanent qui ne permettait pas de faire les choses par soi-même m’a tout de suite rebuté. Je suis tombé sur des professeurs de théâtre qui m’ont poussé à faire naturellement de la chanson car il y avait tout cet art du son dans la parole.»

Cette formation théâtrale doit aussi aider à prendre un public par la main dans un concert ?
Babx : «C’est possible même si je pense que ce n’est pas la même chose. Avec une chanson, surtout lorsqu’on les écrit soi même on se met à nu. Ce n’est pas la même chose que lorsqu’on défend un texte d’un auteur qui a fait ses preuves. Quand on dit du Shakespeare il faut le faire le mieux possible mais il y a déjà du vécu derrière.»

Cela m’étonnerait cependant que vous fassiez un concert « normal » ?
Babx : «Il faut que ce soit un moment particulier. Unique. Je relie souvent le concert à une messe Vaudou. Il faut que mes concerts soient oniriques. J’ai beaucoup été marqué par le bouquin d’Artaud : «Le théâtre et son double» ou en gros il faut que ce soit un rituel. Un sacrifice shamanique. Il parle de ça dans l’acte de jouer mais c’est déplaçable dans l’acte de chanter. Quand on va voir Tom Waits au Grand Rex on a l’impression de voir un sorcier. J’aimerais bien donner ce ton là à mes concerts.»

L’album sort très bientôt comment vivez vous ces derniers jours avant de connaître ce que va penser le public de votre travail ?
Babx : «C’est horrible ! infernal ! (rire). On passe d’un coup de son cabinet de recherche, de son laboratoire qui ne concernait qu’un public restreint. Alors que là on est lancé dans la fosse. C’est marrant de s’imaginer que cet album va tomber dans les oreilles de tas de gens. Tout d’un coup c’est très bizarre.»

Pierre DERENSY