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Mathieu Boogaerts
 

par Pierre Derensy (07/05/05)

 
Extrait en musique

 

 
Article par I-Muzzik

 

Ce «Michel» aurait pu sonner comme un hommage aux Beatles, mais loin de là l’idée de Mathieu Boogaerts, comme vous le verrez dans l’interview ce choix n’est pas anodin mais n’est pas non plus signe d’une philosophie pompière avec clef et entre-sol pour ouvrir les boites du disque. Tout est simple chez ce garçon sans être simpliste, naïf ? certainement pas : intelligent et raisonné humainement. Une grande qualité.

Avant de parler de ton propre nouvel album, j’aurais voulu parler de cet album de duo des artistes Tôt ou Tard qui sort ces jours ci. Comment as tu été impliqué dans ce projet ?

Mathieu Boogaerts : « En fait c’est le patron de la boite qui m’en a parlé. A priori j’étais contre. Pas catégoriquement mais à mon avis ce n’est pas parce que nous avons des copains dans la musique qu’il y a légitimité à faire de la musique ensemble. Ce n’est pas parce qu’on s’entend bien et qu’on se connaît tous qu’il fallait passer par ces duos, surtout que j’ai beaucoup de mal à collaborer avec les autres. Donc j’étais froid à l’idée. Je leur ai dit que pour moi il fallait que s’il y avait duo, il devait y avoir une chanson écrite pour cet exercice, que ce soit pas une chanson pour une personne chantée par deux personnes : c’était mon cahier des charges.»

Tu chantes le premier titre « Demain Demain » avec JP Nataf et les Bombes 2 Bal puis « Na Na Na » avec Vincent Delerm et pour finir un titre avec Dick Annegarn, qu’est ce que t’a apporté de rencontrer ces chanteurs ?

Mathieu Boogaerts : «J’ai été sollicité par Dick et Vincent Delerm que j’aime beaucoup et que je connais bien, ils avaient tous les deux écrit une chanson pour l’occasion. Dick avait écrit un titre nous concernant, c’était une histoire qui nous était arrivé à tous les deux. Ensuite un truc qui n’était pas prévu c’est la chanson avec JP Nataf et les Bombes 2 Bal, comme c’est une chanson de village où tout le monde pouvait chanter j’ai vraiment adoré la faire. Pour info ça c’est fait pendant que je faisais mon propre disque. Une journée par ci, une journée par là. Le studio dans lequel j’ai enregistré ça était à 400 mètres du studio où j’enregistrais «Michel».

Par contre «L’espace» qui est une de tes chansons a été reprise, qu’est ce que cela t’as fait d’entendre l’une de tes compositions chantée par d’autres ?

Mathieu Boogaerts : «J’adore ! d’un seul coup la chanson existe de toute façon. C’est une sensation agréable de s’imaginer qu’un titre vit non pas qu’à travers ma voix mais bien en tant que tel. En même temps je suis critique sur la version livrée : je ne suis pas fan du mélange des deux voix ensemble. Ca me fait plaisir mais je ne trouve pas ça génial non plus.»

On est obligé de parler de ton titre avec Delerm : Dans « Na Na Na » tu te moques des interviews et des journalistes qui te posent toujours la même question. Je vais donc reprendre cette chanson en te demandant « On dit de toi que tu es un artiste minimaliste » ?

Mathieu Boogaerts : « (rire) Sur le disque la réponse est improvisée au même titre que je suis en train d’improviser les réponses à tes questions. On a gardé la première prise de chacun car il y avait quelque chose de spontané. Ce que je peux dire c’est qu’en fait, en aucun cas je ne peux contester l’avis que donne quelqu’un sur ce que je fais et la façon dont cela raisonne pour lui. La deuxième chose c’est qu’il peut y avoir un effet pervers et c’est ce que nous faisons d’ailleurs c’est qu’un journaliste dit que c’est minimaliste, c’est écrit dans le dossier de presse et le deuxième journaliste va repuiser dans les questions du premier alors que cela ne lui serait peut être pas passé par la tête s’il ne l’avait pas lu. Sur mon premier disque un journaliste m’avait comparé à Dominique A et sur les 400 interviews que j’ai faites il n’y en a pas un qui ne m’a pas demandé mon rapport avec Dominique A.»

Ca te dérange qu’on essaye de qualifier quelque chose d’inqualifiable qu’est finalement la musique ?

Mathieu Boogaerts : «Je peux comprendre le processus. Moi même je fais la même chose sur un film ou un disque, c’est souvent un peu réducteur mais dans la presse écrite où l’on est obligé de faire écouter de la musique par des mots c’est presque indispensable. En fait je me résigne… (rire) le problème vient du fait que les gens qui ne me connaissent pas retiennent les 2, 3 mots phares et s’imaginent un truc qui ne correspond pas à ce que je suis.»

On en arrive à «Michel» qui est donc le titre de l’album car finalement tu aimes ce prénom et qu’il était difficile de trouver une appellation phare à ton disque ?

Mathieu Boogaerts : «Tout à fait, ce n’est pas naturel chez moi. J’ai toujours eu l’intention d’écrire des chansons indépendantes, après le système fait qu’on les réuni par douze et qu’on les vend par douze et que je suis obligé de me prêter à cette obligation. Après trouver un titre générique pour douze chansons différentes c’est à priori impossible (sauf si je fais un disque concept ce que je n’ai pas encore fait) donc là plutôt que de me prendre la tête je me suis dit que j’allais nommer le disque par un prénom. Comme c’est «un» disque c’est un prénom masculin, et ce prénom est mon prénom masculin préféré du moment.»

On pouvait penser que ton Michel serait plus approprié avec deux « L » et un « E » au bout ?

Mathieu Boogaerts : «C’est sur mais cela n’était pas la même démarche. Je voulais vraiment donner un nom au disque en tant que matériel mais pas donner un nom à la personne à laquelle je m’adresse.»

Est ce aussi difficile de faire un 4ème album que d’en trouver son titre ?

Mathieu Boogaerts : « Oui. Je pense qu’après celui là je ne sais pas ce que je vais faire. Vraiment.»

Alors qu’avant ce n’était pas le cas ?

Mathieu Boogaerts : « Ca toujours été dur, parce que j’ai toujours été perfectionniste et jusque-boutiste. Très exigent avec moi même me demandant une somme de temps et d’énergie incroyable. Sauf qu’avec ce disque là je pense avoir trouvé et exposé toute une partie de mon langage. Sur le premier disque c’est beaucoup plus facile, tout est frais et nouveau. La difficulté vient dès le deuxième.»

Et ces problèmes s’accumulent t’ils au point qu’au quatrième l’on soit au bout du rouleau ?

Mathieu Boogaerts : « Pas vraiment. En fait ce qui est très important c’est qu’entre chaque disque il y ai beaucoup de concerts et de rencontres. Que le laps de temps soit assez large afin que le jour où l’on doit à nouveau fixer sa musique sur un support il y a un truc nouveau. En l’occurrence, comme j’avais beaucoup fait de concerts guitare-voix j’avais envie de faire «Michel» de cette manière. Le ton que j’avais pendant ces concerts est un peu le ton de ce disque dans ma façon de les délivrer.»

Tu donnes souvent des nouvelles de toi ou des autres à travers tes chansons, c’est un moyen de dire que tout va bien à travers tes disques ?

Mathieu Boogaerts : «Faire un disque, ou plutôt écrire des chansons c’est pour donner des nouvelles de moi. Pas forcément des bonnes nouvelles d’ailleurs. Mais tout ça est très inconscient chez moi. Pourquoi un mec est plombier et l’autre auteur – compositeur - interprète ? il y a sûrement une raison mais je ne veux pas démonter le bidule. A mon avis c’est pour avoir une certaine forme de reconnaissance et que l’on m’écoute.»

« Siliguri » c’était ton zizi de Pierre Perret à toi ?

Mathieu Boogaerts : «Effectivement c’est le moyen de dire les mots caca-zizi-cul dans une chanson.»

Tu inventes souvent des néologismes géographiques ?

Mathieu Boogaerts : «C’est une liberté que je m’accorde assez facilement. Par exemple dans «Keyornew» qui veut dire New-York en verlan, j’y ai mis beaucoup de mots anglais mis à l’envers comme «fullitybeau», «morowto», c’est une espèce de forme, un exercice de style.»

Ton français qui t’es propre devient presque une langue universelle au service de la musique ?

Mathieu Boogaerts : «Whaou c’est gentil ! Beaucoup mieux que «naïf» ou «minimaliste» !»

Par contre tu parles souvent de l’amour sans jamais utiliser le mot ?

Mathieu Boogaerts : «Je ne pars pas d’une chanson avec un principe. Là tu me l’apprends par exemple (rire). Je viens de me rendre compte grâce à toi que c’est vrai ce que tu dis. C’est comme ça. Les mots qui sont sur ce disque ou le disque précédent sont des mots que je valide, que j’organise entre eux en répondant à un espèce d’instinct.»

L’inspiration de «Michel» a une consonance européenne alors que pour « 2000 » tu avais puisé la forme du disque de tes voyages en Afrique, qu’est ce que cela a changé au final ?

Mathieu Boogaerts : «Je ne pense pas que les voyages que je fais ont une influence réelle sur le disque. Une chanson que j’écris à New-York ou à Berlin est la même… enfin je crois… c’est plutôt l’idée de me retrouver un peu tout seul dans un endroit que je ne connais pas trop. C’est plutôt un contexte qui me fait rentrer dans cet état second propice à la composition.»

Apparemment l’instrument le plus important pour toi c’est ton dictaphone ?

Mathieu Boogaerts : «C’est un outil. Comme je n’écris pas la musique j’aime l’avoir à côté de moi. Je ne suis pas à l’abri qu’à tout moment une idée arrive et que je n’ai pas de quoi la retenir.»

Tu n’as jamais tenté de livrer tes titres bruts sortis tout droit de cet outil ?

Mathieu Boogaerts : « Non car ce ne sont que des ébauches et je n’ai pas la prétention que cela ai une valeur commerciale.»

Ce nouvel album tu l’as commencé tout seul pour y coller le travail de tes amis ensuite, es tu du genre à écouter le point de vue des autres ou as tu déjà à l’avance une idée bien précise de ce que tu veux faire sans varier de cette vision ?

Mathieu Boogaerts : « Quand je pense avoir raison : j’ai raison ! (rire). Et objectivement je pense avoir raison. Après les gens peuvent ne pas aimer mais c’est moi l’artiste. Dans un disque c’est moi qui le signe donc c’est moi qui choisi au final. Je suis ravi après quand l’on me donne quelque chose qui peut aider mais si jamais 9 personnes pensent que c’est pas bon et moi je pense que c’est une bonne chose je le mettrais quand même (rire). Peut être que si j’écoutais les autres je vendrais 10 fois plus de disques.»

C’est pas forcément très bien d’en vendre dix fois plus ?

Mathieu Boogaerts : « Ho si ! je fais ce métier pour être écouté par le plus grand nombre. Si j’ai la prétention de sortir ma musique de sa chambre de bonne et de mettre ma photo ainsi que mon nom c’est pour la faire partager avec le plus de monde possible. Si jamais tu me demandes de faire des concessions pour y arriver je ne le ferais pas mais si jamais cela marche encore mieux pour moi avec mon style et mes idées je serais ravi.»

Fais tu attention au studio dans lequel tu vas enregistrer ?

Mathieu Boogaerts : « Oui beaucoup. Je fais attention à tous les gens avec lesquels je collabore. Par exemple j’ai choisi Renaud Letang car c’est un mec que je connais bien depuis 10 ans et qui à bon goût car je suis sur qu’en étant avec lui il ne va pas me mettre une reverbe pourris. On évolue dans la même esthétique. Il aime beaucoup ce que je fais et pour moi c’est important que quelqu’un dégage une image positive.»

La pochette de M/M avec qui tu travailles depuis longtemps est différente des précédentes, on te voit beaucoup plus ?

Mathieu Boogaerts : « Tout à fait. De même titre que le disque est différent aussi. Plus sérieux, plus premier degré. On a décidé de montrer ma tête alors qu’avant on la montrait jamais ou en tout petit. Là c’était normal que la photo soit un portrait.»

Tu commences une tournée cette fois ci en groupe, le chanteur solo en a t’il eu marre des projections vidéos et du manque organique derrière lui ?

Mathieu Boogaerts : «J’en ai eu marre… pas à vie mais c’est important en faisant un concert de s’amuser. Si je continuais tout seul j’allais m’ennuyer… j’ai besoin de changer de style afin de montrer mes chansons différemment régulièrement. En réaction à cette tournée actuelle avec des musiciens la prochaine sera sûrement solo.»

Sans l’orgue offert par ton père à ta mère en serais tu là aujourd’hui ?

Mathieu Boogaerts : «Je n’en ai aucune idée. La musique fait vraiment partie de ma vie. Si je pars deux jours sans guitare je suis malade. Je suis très attiré par la musique autour du moi.»

Est ce un luxe d’être signé par Vincent Frèrebeau le patron de Tôt ou Tard ?

Mathieu Boogaerts : « Non ce n’est pas un luxe ! c’est plutôt… même pas un privilège… c’est simplement bien !»

Pour conclure, j’aurais aimé, comme tu aimes prendre les gens de ton label pour faire des chœurs dans tes chansons, que tu me dises quelle est la personne qui chante le mieux ?

Mathieu Boogaerts : « (rire) je pense que c’est Virginie Aussiètre qui est celle qui s’occupe de la production exécutive.»


Pierre DERENSY